Un retour chargé d’émotion
Lorsqu’Amina a remis les pieds dans son village pour la première fois depuis des années, à la fin du conflit en Syrie, un mélange d’émotions l’a envahi.
Tout d’abord, elle a été inondée de joie lorsqu’elle a vu que son cher jardin de terrasse avait survécu aux bombardements et aux attaques aériennes. C’était presque un signe de bienvenue.
« J’ai été surprise de voir mes plantes debout, comme si elles m’avaient attendue », déclare-t-elle, ajoutant : « Alors que j’étais obligée de vivre loin de chez moi, déplacée, j’ai souvent pensé à mes fleurs. Je craignais qu’elles ne dépérissent sans personne pour s’en occuper. Le calme d’une tasse de café dans mon jardin à côté de mes plantes me manquait ».
Cependant, si la vue de son jardin lui procure de la joie, les scènes de destruction dans son village lui pèsent lourdement sur le cœur.
« Ma joie était incomplète, car l’ampleur des destructions dans notre village était accablante », poursuit Amina.

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Reconstruire au milieu des ruines
Ils sont arrivés ici, sans rien n’apporter d’autre que la nostalgie et la tendresse qu’ils éprouvaient pour leur terre natale, mais ils n’y ont trouvé que destruction.
Sarmin portait clairement les cicatrices de la guerre, avec de nombreuses maisons réduites à l’état de ruines par les attaques de l’ancien gouvernement. De nombreux voisins d’Amina qui étaient rentrés eux aussi dans l’espoir de retourner vivre dans leurs maisons, ont été dévastés de voir l’ampleur de la destruction des maisons et du village.
La maison familiale d’Amina était l’une des rares à tenir encore debout.
« Malheureusement, nombre de nos voisins qui étaient revenus de camps de réfugiés de Türkiye et de plusieurs régions de Syrie n’ont pas eu d’autre choix que de quitter de nouveau le village après avoir constaté l’état dans lequel se trouvaient leurs maisons. Ils sont arrivés ici, sans rien n’apporter d’autre que la nostalgie et la tendresse qu’ils éprouvaient pour leur terre natale, mais ils n’y ont trouvé que destruction », raconte Amina.

Les familles dont les maisons ont été détruites doivent faire face à des rénovations coûteuses avant de pouvoir retourner vivre dans leur communauté.
« J’ai été très heureuse que ma fille et sa famille, qui revenaient de Türkiye, aient pu réparer leur maison. Mon fils n’a malheureusement pas eu cette chance. J’ai pleuré lorsque j’ai vu sa maison, qu’il avait bâtie de ses propres mains et à la sueur de son front, en ruines », poursuit Amina.
« Ceux qui en ont les ressources peuvent rentrer, mais les autres attendent la miséricorde de Dieu pour pouvoir trouver une maison digne de ce nom dans leur propre village », ajoute-t-elle.
La destruction d’infrastructures vitales, telles que les centres de santé, les écoles, les magasins et les boulangeries, ne fait qu’aggraver leurs difficultés, laissant les personnes de retour chez elles aux prises avec un manque d’installations de base essentielles à la vie quotidienne.
« La plupart des campagnes syriennes sont inhabitables, dévastées par la guerre », fait remarquer Amina.
La fuite vers l’inconnu
La famille d’Amina compte parmi les millions de déplacés ayant dû quitter leurs villes et villages pendant le conflit qui a ravagé la Syrie pendant près de 14 ans.
La perte de son fils en 2013 dans une explosion alors qu’il était parti chercher du travail dans le nord d’Alep a laissé une cicatrice indélébile dans le cœur d’Amina.
« Le jour où mon fils Jameel est mort et la nuit du huitième jour du ramadan de 2020 sont deux dates que je n’oublierai jamais », déclare Amina, amère.
« Le huitième jour du ramadan de 2020 est le jour où nous avons été forcés de quitter notre maison. Nous nous apprêtions à prendre le dernier repas de la journée avant de commencer notre jeûne le matin, mais la nourriture et les fragments des bombardements ont semblé se mélanger. J’entends encore les pleurs et les cris de mes petits-enfants », poursuit Amina.
« Seul le cri de mon fils Omar m’a sortie de ma stupeur : "S’il-te plaît, Mère, laisse-nous quitter la maison et fuir les avions de guerre, ou nous mourrons de cette horreur avant même que les bombes ne nous atteignent." »

Le jour où mon fils Jameel est mort et la nuit du huitième jour du ramadan de 2020 sont deux dates que je n’oublierai jamais.
Fuyant vers le nord d’Idleb, la famille d’Amina a d’abord passé des semaines dans une tente qu’elle avait plantée parmi les oliviers sur les collines entourant son village.
« Être forcés de courir ainsi, dans le froid de l’hiver et au milieu de la nuit, a été un moment de pure terreur. Plus tard, quand il a plu, nous avons même dû abandonner les objets de première nécessité que nous avions emportés, car il était trop difficile de les transporter sur les routes boueuses. Lulu, la poupée de ma petite-fille, était la seule chose qui restait lorsque nous avons atteint les camps de déplacés d’Al Dana plus au nord », se remémore Amina.
Le déplacement a été extrêmement difficile pour la famille d’Amina, aussi bien pour les plus jeunes que pour les plus âgés.
« La plupart du temps, mon époux et moi-même devions nous contenter d’un repas par jour, afin de préserver le peu de nourriture disponible pour nos jeunes petits-enfants. Mais il n’y avait jamais assez de nourriture, et les enfants perdaient du poids et étaient souvent malades. Il n’y avait pas non plus d’école pour eux », explique Amina.
Appel urgent à la poursuite du soutien
En dépit des difficultés rencontrées après être retournée chez elle, la famille d’Amina a fortement apprécié le sentiment de sécurité qui a accompagné la fin du conflit.
« Nous étions très heureux de retourner dans notre terre natale. Nous dormons paisiblement et nous nous sentons en sécurité, sans bombardement ni avion de guerre au-dessus de nos têtes. Mes enfants et petits-enfants peuvent jouer sous le soleil, et ne sont plus contraints à l’obscurité des tentes », partage Amina.
Toutefois, elle reste prudente quant à ce que l’avenir leur réserve. Amina souligne qu’il reste urgent que les agents humanitaires continuent d’apporter un soutien vital et aident les familles vulnérables à faire face aux incertitudes qui les guettent.
« Nous espérions qu’à présent, près de deux mois après la chute du régime, les organisations humanitaires accourraient pour nous aider. Mais, malheureusement, aucune initiative n’a été prise à l’exception du programme d’intervention d’urgence de GOAL », explique Amina. Elle ajoute : « Notre seul espoir est de ne pas être oubliés, parce que nous avons besoin de tout maintenant, encore plus qu’avant, car nos maisons ont été détruites et nos villages abandonnés ».
La hausse soudaine et vertigineuse des prix des produits de base après la fin du conflit a également engendré une nouvelle série de difficultés pour les communautés vulnérables en Syrie.

« Nous sommes tous choqués par les prix exorbitants, en particulier du gaz, du fioul et de la nourriture. Aujourd’hui, nous n’avons plus de gaz de cuisine, et nous ne pouvons pas remplacer la bouteille parce que nous n’avons plus d’argent. Nous n’avons pas d’autre choix que de nous contenter d’aliments crus », explique Amina.
Cette aide est importante pour nous. Elle nous permet de nous assurer une miche de pain et les nécessités de base de la vie. Ce sont là des éléments importants qui nous rendent optimistes.

Cette aide est importante pour nous. Elle nous permet de nous assurer une miche de pain et les nécessités de base de la vie. Ce sont là des éléments importants qui nous rendent optimistes.
Une lueur d’espoir en des temps incertains
Reconnaissant que le chemin à parcourir risque d’être semé d’embûches et consciente que l’aide humanitaire ne peut pas à elle seule relever tous les défis auxquels sont confrontées les personnes qui retournent chez elles, Amina déclare toujours trouver du réconfort dans l’aide apportée par les organisations humanitaires, telles que GOAL. « Cette aide est importante pour nous, même si elle n’est pas suffisante pour réparer et restaurer les maisons détruites. Elle nous permet de nous assurer une miche de pain et les nécessités de base de la vie. Ce sont là des éléments importants qui nous rendent optimistes », explique-t-elle.
Elle est convaincue que l’aide contribuera grandement à donner aux personnes les moyens d’agir et leur procurera un sentiment de sécurité, d’espoir et d’optimisme en vue d’un avenir plus radieux.
« L’aide soulage également d’un lourd fardeau les parents, comme mon fils Mustafa, qui s’inquiètent de l’avenir de leurs enfants. Grâce à l’assistance en espèces de GOAL, il a pu rembourser une partie de ses dettes et s’assurer que son enfant en bas âge Mohammed peut continuer à avoir du lait », conclut-elle.

GOAL en Syrie
Après plus de dix ans de conflit, la Syrie compte plus de 6,8 millions de déplacés internes. Au total, 70 % des Syriens ont besoin d’une aide humanitaire et en dépendent pour survivre au quotidien.
Les équipes de GOAL travaillent sur le terrain en Syrie depuis que le conflit a éclaté en 2012. L’année dernière, le programme d’intervention d’urgence de GOAL est venu en aide à plus de 287 000 personnes nouvellement déplacées en leur apportant de la nourriture, du matériel de cuisine et une assistance financière. Grâce au travail mené par les ingénieurs de GOAL qui réparent les dommages causés à l’infrastructure du réseau d’eau, plus de 1,1 million de personnes ont désormais accès à l’eau potable dans leur maison. Par ailleurs, 430 000 personnes bénéficient du programme de production de pain de GOAL dans le nord-ouest de la Syrie.
Notre impact en chiffres
+1 million
Fournir une eau salubre à plus de 1 million de personnes
+430 000
Fournir du pain à plus de 430 000 personnes chaque jour
2,1 millions
De personnes aidées en 2023
2012
GOAL commence ses interventions en Syrie
L’histoire de Louay
Louay Tajiddin, un ingénieur en eau et assainissement de GOAL en Syrie, partage son expérience personnelle, lui qui a dû quitter son travail et son domicile en raison du conflit dans le pays.
Il souligne les difficultés rencontrées par les Syriens du fait du conflit prolongé et l’importance de bénéficier d’un accès à des services de base, en particulier l’eau salubre.
Pour aider les communautés vulnérables en Syrie, Louay a mis ses compétences et son expérience au service de l’action humanitaire.
« Il était difficile de voir de plus en plus de familles vulnérables souffrir dans un contexte de déplacement et de conflit. Mais je savais que ce n’était pas une fatalité. J’ai senti que je pouvais faire plus pour mes concitoyens, étant donné mon expertise dans l’entretien des infrastructures de service public. C’était quelque chose dont ma communauté avait désespérément besoin. »
Apprenez-en davantage sur la façon dont Louay et d’autres membres du personnel de GOAL en Syrie, grâce au financement de l’Union européenne, réparent et assurent un approvisionnement en eau salubre à plus de 800 000 personnes dans le nord-ouest de la Syrie.
